lundi 12 mars 2012

Après de longues semaines d'errance frénétique


Mon seul vrai pays, au fond, c'est la poésie. Quand je fais autre chose que lire, quand j'ouvre la bouche pour dire autre chose que «Je t'aime», ou que pour réciter à voix basse un poème de René Char ou de Saint-John Perse : alors je dérape, je m'échappe, je m'oublie (a-letheia : la vérité, selon Heidegger, est non-oubli). Mon pays, c'est chaque singularité que j'embrasse en silence. Merci à celles et ceux qui me font cadeau de l'enseignement difficile d'une de mes erreurs.
QU'IL VIVE! 
par René Char

Ce pays n'est qu'un voeu de l'esprit, un contre-sépulcre.

Dans mon pays, les tendres preuves du printemps et les oiseaux mal habillés sont préférés aux buts lointains.

La vérité attend l'aurore à côté d'une bougie. Le verre de fenêtre est négligé. Qu'importe à l'attentif.

Dans mon pays, on ne questionne pas un homme ému.

Il n'y a pas d'ombre maligne sur la barque chavirée.

Bonjour à peine, est inconnu dans mon pays.

On n'emprunte que ce qui peut se rendre augmenté.

Il y a des feuilles, beaucoup de feuilles sur les arbres de mon pays. Les branches sont libres de n'avoir pas de fruits.

On ne croit pas à la bonne foi du vainqueur.

Dans mon pays, on remercie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Baille-y ça!